L’amnésie traumatique ne relève ni du mythe ni du simple oubli volontaire. Des années peuvent s’écouler avant que des fragments de mémoire ne réapparaissent, souvent sans avertissement. Cette réalité bouleverse les trajectoires personnelles et complexifie la prise en charge thérapeutique.
Des méthodes restées longtemps en marge s’imposent aujourd’hui auprès de personnes en souffrance. L’EMDR, par exemple, s’affirme là où les thérapies conventionnelles peinent à agir pleinement. D’autres approches, autrefois jugées atypiques, se frayent un chemin, soutenues par des témoignages et des études qui confirment peu à peu leur légitimité dans le parcours de soin.
Pourquoi certains souvenirs traumatiques restent-ils enfouis ?
Un traumatisme psychologique ne laisse pas que des traces visibles. L’impact agit silencieusement, désorganisant parfois la mémoire traumatique. Face à un événement traumatique, qu’il s’agisse d’une agression, d’un accident, d’une catastrophe ou d’une perte brutale, le cerveau enclenche un mode survie. Certaines images, certains faits disparaissent de la surface, dissociés du reste de l’histoire personnelle. Ce réflexe de sauvegarde, on le nomme amnésie traumatique. Il ne traduit ni une fragilité ni un refus de se souvenir.
Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) en est la démonstration la plus connue aujourd’hui, mettant en lumière la ténacité de ces processus. Les souvenirs du traumatisme sont loin d’avoir disparu. Ils réapparaissent, souvent de manière brutale, via des sensations corporelles, des angoisses ou des réactions soudaines. Parfois, un banal déclencheur, une odeur, un son, un lieu ou même une émotion, réactive violemment ces morceaux égarés de mémoire. Vivre avec ce type d’amnésie, c’est avancer sur un terrain incertain, fait de silences et de bouffées inattendues.
La perte de souvenirs liée à un choc s’accompagne la plupart du temps de symptômes post-traumatiques : flashbacks, rêves perturbants, anxiété persistante, troubles du sommeil, changements alimentaires, voire dépendances. Autant de signes d’une lutte intérieure, entre la nécessité de tenir à distance ce qui est invivable et l’incapacité à effacer ce qui s’est inscrit au plus profond.
Pour mieux saisir la réalité de ces phénomènes, quelques repères s’imposent :
- Un traumatisme psychologique peut entraîner stress post-traumatique, mémoire traumatique ou amnésie de certains épisodes, parfois sur de longues périodes.
- L’amnésie traumatique est une réaction du cerveau, qui peut émerger de façon soudaine pour permettre de poursuivre sa route malgré le choc ou la violence de l’événement traversé.
Amnésie traumatique : comprendre ce mécanisme de protection de la mémoire
La notion de mémoire traumatique ne se limite pas au fait d’oublier. Face à un événement traumatique, le cerveau met parfois en place une barrière totale ou partielle à l’accès aux souvenirs concernés, sans explication apparente pour la personne. Aucune suppression réelle : le souvenir existe bel et bien, simplement dissocié de la conscience ordinaire.
Le retour possible de souvenirs, à la faveur d’un déclencheur, qu’il soit sensoriel ou émotionnel, illustre combien ce mécanisme, conçu pour protéger, peut aussi déborder. Les traces réapparaissent de manière désordonnée : anxiété, flashbacks, cauchemars, insomnies, parfois comportements addictifs ou alimentaires troublés. Ce mur protecteur engendre par ricochet l’apparition de nouveaux symptômes.
Ce processus s’accompagne concrètement de plusieurs conséquences :
- L’amnésie traumatique isole le souvenir, ce qui protège momentanément la personne, mais laisse les émotions et les sensations parfois incompréhensibles ou débordantes.
- Dépression, anxiété, certaines peurs ou des conduites addictives se retrouvent fréquemment chez ceux qui traversent ce type d’expérience.
Une narration intérieure morcelée s’installe alors, empêchant de relier les fragments d’histoire en un tout cohérent. D’où l’importance de recourir à un accompagnement, apte à réassembler peu à peu ces pans oubliés dans un cadre sûr, où chaque avancée respecte le rythme du vécu.
EMDR et autres approches : quelles solutions pour débloquer les souvenirs traumatiques ?
La thérapie EMDR (eye movement desensitization and reprocessing) s’est imposée comme une méthode de référence en cas de trouble de stress post-traumatique. Imaginée à la fin des années 1980 par Francine Shapiro, elle s’appuie sur des stimulations bilatérales (mouvements oculaires, stimulations tactiles ou sonores), réalisées sous la direction d’un thérapeute qualifié. Cette technique facilite la digestion des souvenirs douloureux, aide à apaiser les tempêtes émotionnelles, et redonne petit à petit une continuité à l’histoire de vie. L’EMDR est aujourd’hui reconnue pour ses résultats solides, pas seulement sur le TSPT, mais aussi pour la dépression, certaines phobies et situations d’addiction.
L’EMDR demande sérieux et cadre strict. Un praticien bien formé, supervisé régulièrement, s’impose surtout lorsque les souvenirs sont fragmentés, recouverts par une amnésie traumatique ou difficiles à aborder. Il existe toutefois certaines contre-indications (comme dans le cas de troubles psychotiques), qui nécessitent un échange approfondi avec un professionnel aguerri avant de se lancer.
D’autres solutions coexistent aujourd’hui : thérapies cognitives et comportementales (TCC), hypnose, ou encore pratiques de pleine conscience. Chacune apporte ses ressources propres pour travailler sur les émotions, le rapport à l’événement ou les croyances héritées du trauma. La bonne option découle d’un travail de réflexion partagé avec le professionnel, tenant compte tant de la souffrance exprimée que de la singularité du vécu. Il ne s’agit pas d’exhumer la mémoire à tout prix, mais de permettre une réappropriation progressive, adaptée à ce que la personne se sent capable d’affronter dans l’instant.
Conseils pour choisir une thérapie adaptée et avancer à son rythme
Choisir sa thérapie ne relève jamais de la chance. Ce qu’on observe, en réalité, c’est que la relation de confiance, la transparence sur la méthode employée, le sentiment d’être compris et sécurisé, pèsent bien plus que la technicité d’un protocole. On gagne à interroger son thérapeute sur sa manière d’accompagner, sur ses formations ou sur sa supervision. Parallèlement, avoir recours à des groupes de parole, trouver du soutien au sein d’une association de victimes ou se documenter via des sources indépendantes favorise le parcours individuel et la sortie de l’isolement. Des structures dédiées proposent souvent guides, ateliers d’information ou oreilles attentives, dans le respect de l’anonymat.
Toute avancée s’inscrit dans un rythme singulier : la progression se fait par à-coups, jamais selon un chemin tout tracé. Parfois, mettre la démarche en pause s’impose. D’autres fois, il devient possible d’essayer une nouvelle technique ou d’élargir l’accompagnement. Patiemment, par touches successives, la résilience se construit, y compris au prix de quelques allers-retours.
La présence du cercle proche est précieuse, sans remplacer pour autant l’appui d’un professionnel. Echanger avec des personnes ayant vécu des expériences comparables, s’appuyer sur le soutien d’un groupe ou d’une association, se confier à un proche à l’écoute : autant de petits leviers pour (re)trouver de l’air dans un parcours souvent éprouvant. En complément, certaines pratiques, méditation de pleine conscience, activité physique, qualité du sommeil, peuvent offrir des points d’ancrage au quotidien, faciliter l’apaisement et soutenir la constellation des approches thérapeutiques.
| Ressources complémentaires | Objectifs |
|---|---|
| Soutien social / Groupe de parole | Rompre l’isolement, valider le vécu |
| Méditation & activité physique | Apaiser les tensions, favoriser le bien-être |
| Association Mémoire Traumatique | Information fiable, orientation, défense des droits |
Recoller les morceaux de sa mémoire, c’est parfois ouvrir une brèche, trembler, puis découvrir que même les plus petits souvenirs retrouvés redonnent épaisseur au présent. Sur ce chemin qui bifurque, chaque avancée façonne une nouvelle histoire, unique, imprévisible, irriguée de volonté et d’espoir.


